Pour agir contre le changement climatique et diminuer son bilan carbone personnel, arrêter de prendre l’avion est une solution qui semble évidente. Les chiffres sont sans appel : les émissions de CO2 d’un avion par voyageur et par km sont 10 fois supérieures à celle d’un bus et 45 fois supérieures à celle d’un train.
Faut-il renoncer aux voyages en avion pour réduire son empreinte carbone ? La question se pose lorsqu’on connaît le bilan carbone estimé d’un aller-retour Paris-New York : 2 tonnes de CO2e, soit un cinquième de l’empreinte carbone moyenne annuelle d’un Français (environ 10 tonnes de CO2e par an).
Surtout, cela représente la totalité des émissions annuelles auxquelles un Français devrait se limiter (2,1 tonnes de CO2e par an) pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris de 2015. Vous vous rappelez, Laurent Fabius avec son petit marteau, qui nous annonçait un réchauffement climatique de 2 °C maximum à l’horizon 2050 ?
Sommaire
Un petit pas pour faire ta part
Le fait de limiter tes voyages en avion en les remplaçant par l’usage du train (ou en y renonçant carrément) constitue l’un des meilleurs moyens dont tu disposes pour réduire significativement ton empreinte carbone personnelle et agir contre le changement climatique.
Je t’explique pourquoi en trois arguments :
- Un aller-retour Paris-New York émet 2 tonnes de CO2e, soit 20% de l’empreinte carbone moyenne annuelle d’un Français en 2022 et 100 % de sa future empreinte en 2050 pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris de 2015.
- Pour le même trajet, un voyage en train émet en moyenne entre 30 et 40 fois moins de CO2 qu’un voyage en avion.
- Les principaux utilisateurs de l’avion sont les populations les plus aisées car plus de 80 % des êtres humains sur Terre ne sont jamais montés dans un avion.
Si tu veux faire ta part, pas besoin de te faire un dessin : arrête de prendre l’avion ou, si c’est une nécessité absolue, limite tes vols au maximum. Il ne s’agit pas de se fouetter lorsqu’on n’a pas d’autres choix (pour le boulot notamment), mais bien de prendre conscience que ce type de déplacement doit rester exceptionnel pour réduire son bilan carbone personnel.
C’est peu mais c’est beaucoup !
Aujourd’hui, le transport aérien n’est responsable que de 2,1 % des émissions mondiales de CO2(1), ce qui semble bien modeste pour déclencher un tel vacarme autour du « flygskam » (le mouvement international, rendu célèbre par Greta Thunberg, qui désigne « la honte de voyager en avion« ).
En fait, ça représente peu mais c’est quand même… beaucoup ! C’est par exemple bien moins que les activités liées à internet (au moins 4 %) ou que le secteur du textile (au moins 8 %). Mais ce chiffre doit être mis en perspective car cet impact carbone est produit par un nombre réduit de personnes : 80 % de la population mondiale n’a jamais pris l’avion.
Et si l’on en croit les chiffres 2019 de l’industrie aérienne, 72 % des voyages en avion sont de nature touristique ou privée contre 28 % de déplacements professionnels et voyages d’affaires.
Et les solutions techniques alors ?
Depuis une quinzaine d’années, les scientifiques du monde entier cherchent la solution miracle qui pourra sauver l’avion : un carburant moins polluant pour les avions. Au milieu de la dernière décennie, Air France a ainsi réalisé une série de vols-test entre Paris et Toulouse alimentés en utilisant un mélange composé de 90 % de kérosène d’origine fossile et 10 % de biocarburant.
La conclusion fut décevante : une économie d’émissions de CO2 de seulement 6 %. La compagnie nationale a pris la décision d’arrêter d’urgence les essais à cause des coûts exorbitants, à l’époque, du biocarburant.
Théoriquement, les innovations attendues pour l’avenir devraient permettre des améliorations importantes, de l’ordre de 50% du bilan carbone des vols selon les spécialistes. Mais elles ne sont pas prêtes ; les mêmes experts évoquent un horizon de 10 à 15 ans.
« Il est évident que dans une France qui aura divisé ses émissions de gaz à effet de serre par quatre, il n’y aura plus d’avions. On ne peut pas y arriver si on conserve le transport aérien. »
François-Marie Bréon, Physicien-climatologue
Même chose pour les projets d’avions électriques qui font face à un problème de taille : le poids des batteries ! Sur un Airbus A320, il faudrait passer d’une masse de 30 tonnes de kérosène à près de 300 tonnes de batteries électriques. Le problème, c’est qu’au-delà de 70 tonnes, l’avion est trop lourd pour décoller.
Quant à l’hydrogène, qui est un candidat sérieux pour décarboner l’avion du futur, il pose d’autres défis : ce n’est plus son poids qui est l’obstacle principal mais son volume. L’hydrogène utilisé exige quatre fois plus de place que le kérosène, ce qui nécessite d’immenses réservoirs impossibles à caser dans l’architecture d’un avion classique.
Les ingénieurs aéronautiques sont donc en train de dessiner des ailes volantes de 80 m d’envergure qui, seules, pourraient permettre d’offrir un volume suffisant pour entreposer l’hydrogène : là encore, horizon 2035 si tout va bien !
Arrêter de prendre l’avion, sérieux ?
Tous les projets alternatifs ont des échéances à 15 ans minimum. En attendant on fait quoi ?
On peut commencer par consulter les travaux de l’Agence Européenne de l’Environnement qui a établi les bilans carbone des différents modes de transports :
- Train : 14 g de CO2 par passager et par kilomètre
- Petite voiture : 42 g
- Voiture standard : 55 g
- Bus : 68 g
- Moto : 72 g
- Avion : 285 g de CO2 par passager et par kilomètre
Les conclusions s’imposent d’elles-mêmes : les individus ne vont pas arrêter de prendre l’avion du jour au lendemain, mais s’ils sont conscients des enjeux climatiques, ils vont finir par se poser de sérieuses questions sur la pertinence des voyages aériens dans un monde qu’il faut décarboner.
Qui osera encore voyager en avion dans 10 ans ?
Fin 2020, une étude suédoise a révélé que seulement 1 % de la population mondiale serait responsable de la moitié des émissions de CO2 liées à l’aviation(2). Et plus de 80 % de la population mondiale n’a jamais pris l’avion… mais subit l’essentiel des conséquences du changement climatique.
Et au vu des coûts exorbitants de l’avion en matière d’émissions de carbone, le prix des billets finira fatalement par devenir dissuasif.
Donc il ne s’agit pas de se fouetter lorsqu’on n’a pas d’autres choix que de voyager en avion (pour le boulot notamment), mais bien de prendre conscience que ce type de déplacement doit rester exceptionnel pour réduire son bilan carbone personnel.
Est-ce qu’il ne faut pas simplement arrêter de prendre l’avion ? En tout cas, un aller-retour Paris-Ibiza pour le weekend, faut oublier !
(1) Chiffre de 2019 par le Global Carbon Project
(2) Rapport de l’université de Linnaeus (pour l’année 2018)