Ces dernières années, nous sommes passés de la simple méfiance à l’égard du lait en raison d’intolérances au lactose et des allergies à la caséine, à une véritable obsession de non-consommation du produit lui-même. Pourtant, les allergies au lactose sont moins répandues qu’on ne le croit généralement.
J’ai personnellement entendu des confrères confier que, durant des consultations en cabinet, des patients (atteints pour certains de maladies difficilement soignables comme la sclérose en plaque, les polyarthrites rhumatoïdes ou présentant des symptômes fonctionnels tels que la fatigue, des allergies cutanées) prétendaient que le retrait du lait leur avait été recommandé par des médecins.
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Anti-lactose : une croyance ?
Sans réaliser que ces derniers, souvent homéopathes ou naturopathes, colportaient sans doute leur propre rejet de tout ce qui est « dans la norme », voire répondaient au désir des patients d’obtenir d’autres réponses que celles issues de la médecine traditionnelle. Et de proférer des conseils à la lisière de la magie… qui jouaient sacrément avec le feu. Et leur santé !
Certaines attitudes anti-lait, on le voit, s’apparentent indéniablement à une croyance, dans la mesure où elles touchent un aliment éminemment symbolique, et dérivent parfois vers de véritables comportements sectaires, dans la mesure où elles incitent à un changement de mode de vie complet susceptible de mettre en danger la socialisation de l’individu comme sa santé.
En agrégeant chaque cas individuel à un groupe, celui des consommateurs sans lait au sens large, cette tendance coupe peu à peu chacun du reste de la population. Là encore, le risque n’est pas négligeable.
Or cette peur, à mes yeux, est l’un des symptômes des difficultés qu’ont certaines personnes à vivre dans le monde actuel.
Ballottés, ne parvenant plus à trier le vrai du faux dans les informations contradictoires dont les médias nous abreuvent, mettant en doute la moindre information jugée scientifique sous prétexte qu’elle est « officielle » donc non valable, accordant plus de crédit à ce qui se colporte sur le net qu’aux bases de la nutrition, ces gens en viennent à se réfugier dans des croyances quasi-magiques. Puis en deviennent les premiers colporteurs.
Une attitude humaine (je ne la condamne pas, je constate, et pour moi certains sont victimes et non responsables) traduisant une angoisse profonde certes, mais possédant l’inconvénient grave d’avancer que la seule thérapeutique valable est d’exclure le lait et tous ses dérivés de l’alimentation.
L’allergie : mythe ou réalité
« Et les allergies alors, vous en faites quoi ? », grinceront certains. J’y viens.
Et d’abord je vais prendre d’assaut une autre idée reçue : l’allergie au lait est moins répandue qu’on le croit. Comme le rappelle Jean-Marie Bourre dans son livre Le Lait, vrais et faux dangers, paru aux éditions Odile Jacob, il existe beaucoup plus de réactions au saccharose, c’est-à-dire au sucre en morceau consommé tous les jours, que d’allergie au lactose !
Ensuite, pour comprendre de quoi il s’agit, soyons pédagogue. J’utilise ici le mot « allergie », souvent confondu avec le terme « intolérance ». L’allergie alimentaire est l’ensemble des réactions qui mettent en jeu des mécanismes immunologiques.
L’intolérance alimentaire signifie, elle, des réactions toxiques, métaboliques ou pharmacologiques, dans lesquelles aucun rôle n’est dévoué au système immunitaire.
Parfois, les mécanismes d’allergies et d’intolérances peuvent être associés ; et ceux-ci n’ont rien à voir avec l’aversion alimentaire (qui est une affaire de perception et de goût, visant à éliminer l’aliment du régime alimentaire) ou l’exclusion alimentaire elle-même, choix délibéré et personnel d’exclure une famille d’aliments. Les mots ont un sens, donc respectons-le.
Les allergies alimentaires ne cessent d’augmenter dans le monde. Pour simplifier, il s’agit de l’ingestion d’un aliment qui, lors du contact avec l’intestin, va entraîner une série de mécanismes inflammatoires mettant en jeu le système immunologique.
Cette allergie peut créer toutes sortes de symptômes. Du plus grave, c’est-à-dire le choc anaphylactique, particulièrement fréquent lors de l’ingestion des arachides, des crustacés ou du poisson, jusqu’à l’urticaire, qui peut survenir après l’ingestion de n’importe quel aliment.
L’asthme et la rhinite sont aussi des symptômes, mais qui surviennent rarement de façon isolée. Il existe enfin des symptômes controversés d’allergies alimentaires, comme la fatigue chronique, les migraines ou certaines inflammations articulaires.
L’exclusion alimentaire, une fausse solution
Que conclure de ces données connues ? Que si la diversité, la complexité de ces mécanismes font de l’exclusion alimentaire une réponse pratique au problème posé d’allergie au lait chez certains, la variété des réactions constatées est difficile à relier au produit incriminé lui-même.
Or, c’est de ce flou, de ces doutes que profitent les détracteurs du lait – en particulier, mais aussi ceux d’autres produits. Ainsi un consommateur peut être allergique ou intolérant à une autre substance, mais, convaincu que le lait est la cause de son mal, supprimer ce dernier et mieux supporter les douleurs.
Dès lors, il croira dur comme fer avoir trouvé l’origine de sa maladie, le dira ici, là, ailleurs, à ses amis, sur des forums avec la force de l’expérience vécue… sans avoir pour autant raison. Et des légendes nutritionnelles modernes se développent, répandent, jusqu’à devenir des vérités non étayées.
N’y a-t-il aucune allergie au lait, alors ? Si, évidemment. Une allergie due à une protéine, la caséine de lait, qui se caractérise par des symptômes à la fois nets et évocateurs, qui peuvent être confirmés par des tests. Nous avons de fait les moyens, aujourd’hui, de démontrer par de simples analyses biologiques de nombreuses allergies, dont celle-ci.
Soit, mais il faut savoir que, statistiquement, le lait de vache n’est pas parmi les dix plus puissants allergènes alimentaires et qu’avant lui on trouve le poisson, certains additifs, les cacahuètes, le latex…
Entend-on pour autant l’émergence d’une catégorie de personnes rejetant tout poisson et professant cette attitude avec autant de véhémence ? Je ne le crois pas.
Les intolérances au lactose signifient quant à elles que notre organisme est incapable de couper le sucre, le lactose, qu’il contient en ses plus petits constituants. La conséquence est que ce lactose arrive alors dans le colon sans avoir été dégradé, va se trouver fermenté et se comportera ensuite comme une fibre.
C’est cette fermentation qui peut, parfois, devenir source de ballonnements ou d’embarras digestifs. Nulle autre manifestation ne peut être imputée aux intolérances au lactose, sauf à démontrer dans le futur que cette fermentation suscite un certain nombre de réactions capables de définir des symptômes particuliers.
Les personnes qui souffrent d’intolérances au lactose sont concernés par la plupart des laits de mammifères, car ils en contiennent tous, produits laitiers compris. En revanche, les fromages en possèdent très peu puisqu’au moment de l’égouttage une large part a été éliminée, le reste disparaissant grâce à la consommation des bactéries, dont c’est la principale nourriture.
Intolérances au lactose : des disparités entre populations
Autres éléments intéressants à noter, certaines populations sont plus atteintes que d’autres par les intolérances au lactose – il en est ainsi pour celles du Sud. Par ailleurs, l’âge venant, nous perdons notre capacité à le digérer.
Donc une intolérance peut apparaître à l’enfance, mais être guérie avant l’âge de trois ans ; ou survenir après cinquante ans, quand l’enzyme permettant de dégrader le lactose disparaît. L’allergie à la caséine, quant à elle, est un problème plus important.
Elle met en effet en oeuvre de réels mécanismes de protection allergique, c’est-à-dire une inflammation susceptible de déclencher différents symptômes. La désensibilisation à la caséine est possible, mais la réussite de l’exercice pas assurée.
Cette allergie réelle se manifeste non seulement avec l’ingestion de produits laitiers, mais aussi avec le fromage, qui contient beaucoup de caséine.
Donc oui, il existe bien des allergies au lait. Mais bien moins fréquentes ou évidentes que d’aucuns le prétendent ou colportent.
Aussi, sous prétexte (réel) de quelques exemples avérés, nier toute vertu au lait et à ses dérivés au point de vouloir l’exclure totalement de son alimentation me semble pour le moins exagéré et même risqué. D’autant qu’il possède d’autres atouts non négligeables.
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