On présente souvent l’hydrogène comme l’énergie propre du futur. Associé à une pile à combustible, il n’émet pas de CO2 et peut donc être considéré comme non polluant. Génial, on a trouvé le Graal… Hydrogène vert ou gris, ça n’est pourtant pas forcément une solution miracle sur le plan écologique.
L’hydrogène est l’élément le plus abondant dans l’univers. Sur Terre, il entre évidemment dans la composition de l’eau (H2O) et dans celle des matières vivantes. Par exemple, un dixième de notre poids est constitué d’hydrogène.
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L’hydrogène est partout mais difficile à extraire
Mais comme l’électricité, l’hydrogène n’est pas « techniquement » une source d’énergie, c’est un gaz 11 fois plus léger que l’air que nous respirons. L’hydrogène va plutôt servir à acheminer jusqu’à un utilisateur final, une énergie produite par une source d’énergie primaire (comme le pétrole ou l’uranium) .
Contrairement aux combustibles à base de carbone, l’hydrogène ne produit aucun résidu nocif quand il brûle. Quand on utilise de l’hydrogène pour produire de l’électricité dans une pile à combustible, le seul déchet généré est la vapeur d’eau. Il n’y a pas d’émission de polluants ni de gaz à effet de serre.
En ce sens, l’hydrogène est propre : est-ce cela l’hydrogène vert ? Mais l’hydrogène est un gaz très peu dense qui doit être comprimé ou liquéfié pour être utilisé. Cela nécessite de faire appel à une quantité importante d’énergie qui, elle, n’est pas forcément propre…
L’hydrogène n’existe pratiquement pas à l’état pur dans la nature, il est toujours couplé avec au moins une autre molécule. Pour le séparer des autres éléments (carbone, oxygène, etc.), il faut, là encore, mobiliser de l’énergie.
Selon les procédés utilisés, la production de l’hydrogène va générer plus ou moins de carbone dans l’atmosphère :
- L’hydrogène vert, produit par électrolyse de l’eau, est potentiellement le plus respectueux de l’environnement.
- L’hydrogène gris, produit grâce aux méthanes présents dans le gaz naturel, génère des émissions de carbone.
- L’hydrogène noir, issu du charbon, est horriblement émetteur de CO2.
Ainsi 95 % de l’hydrogène du monde est produit à partir de sources d’énergie fossiles, à partir du gaz naturel ou du charbon de bois, qui émettent du CO2, le premier des gaz à effet de serre, dont on cherche justement à se débarrasser dans le cadre de la transition énergétique.
Donc cet hydrogène gris ou noir est tout sauf propre. Sauf évidemment si on « greffe » dans le système de transformation un procédé de capture et de stockage du CO2. Seul hic, cela fait exploser les coûts de production.
Les avantages de l’hydrogène
On l’a vu, l’hydrogène peut être produit par électrolyse de l’eau. Une technique ancienne qui permet de décomposer, grâce à un apport d’électricité, les molécules de H2O en dihydrogène (H2) et en oxygène (O).
Là c’est carrément génial, on utilise de l’électricité pour produire de l’hydrogène qui va nous permettre, en bout de course, de générer de l’énergie. Est-ce qu’on marche sur la tête ?
Un enfant de six ans demanderait : « Mais, papa, pourquoi on n’utilise pas l’électricité directement ? »
Et son père répondrait sans doute : « Pour créer une nouvelle filière industrielle et des nouveaux emplois, mon fils. »
Plus sérieusement, l’intérêt de l’hydrogène vert est réel pour deux raisons principales :
- Il peut être utilisé pour stocker de l’électricité, ce qui permet de pallier la surproduction d’électricité renouvelable (solaire, éolien, etc.) à certains moments et son insuffisance à d’autres.
- Il est transportable et peut donc être utilisé comme carburant pour les voitures (à la place des batteries). Aujourdhui, la plupart des fabricants automobiles ont choisi de le stocker sous forme gazeuse à haute pression (hydrogène comprimé) pour assurer une autonomie de 400 à 600 km à leurs véhicules. Pour des quantités industrielles, le transport de l’hydrogène (sous forme gazeuse) peut aussi se faire par gazoduc.
Où est l’hydrogène vert alors ?
Encore faut-il que l’électricité de départ soit elle-même une électricité provenant d’une source renouvelable (hydraulique, solaire ou éolienne), auquel cas on pourrait effectivement parler d’hydrogène vert.
C’est le pari qu’a tenté la start-up nantaise Lhyfe, qui adapte l’électrolyse à l’intermittence des énergies renouvelables. Elle a inauguré à l’automne 2021, sa première usine d’hydrogène vert à Bouin, en Vendée, en produisant le gaz à partir d’éoliennes installées sur le site. Elle a prévu de développer une soixantaine d’unités à travers l’Europe.
Seul hic, sur le plan économique, ça n’a pas vraiment de sens puisque cet hydrogène « propre » revient, pour le moment, quatre fois plus cher que celui qu’on produit à partir de ressources fossiles.
Donc avant d’affirmer que l’hydrogène est une énergie propre (la quête du fameux hydrogène vert) sous prétexte que la molécule H2 ne pollue pas, il faut considérer son cycle de vie complet, depuis sa production jusqu’à son utilisation, en passant par sa compression.
L’hydrogène vert, une énergie de luxe
Le premier inconvénient de l’hydrogène est son rendement. Il faut environ 7 litres d’hydrogène comprimé pour fournir autant d’énergie qu’un litre d’essence. Par ailleurs, le rendement énergétique d’un moteur à hydrogène est actuellement trois fois inférieur à celui du moteur électrique.
Pour parcourir 100 km en voiture, il faut utiliser et donc stocker 1 kg d’hydrogène. Comme il prend beaucoup de place, pour le stocker dans des bouteilles, des réservoirs ou des fûts, l’industrie automobile le densifie sous forme gazeuse (en augmentant la pression du gaz). Sinon, cela demanderait un volume de stockage considérable. C’est évidemment un procédé très coûteux.
Un autre inconvénient majeur est son prix de revient si on souhaite qu’il reste propre. Le coût de production de l’hydrogène vert se situe entre 4 et 6 €/kg alors que celui de l’hydrogène gris est de 1,5 €/kg. À ce jour, l’hydrogène vert est donc infiniment moins rentable que l’hydrogène gris.
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C’est pas demain la veille…
Les défis technologiques, les coûts élevés, les infrastructures et autres problématiques ont pour le moment favorisé le développement d’autres sources d’énergie renouvelable comme le solaire et l’éolien.
Pourtant, tous les espoirs sont permis. En juillet 2021, la Commission européenne annonçait un cap particulièrement ambitieux : d’ici 2050, l’hydrogène devra représenter 14% de la consommation d’énergie en Europe.
Même si l’hydrogène a le vent en poupe avec, par exemple, les nouveaux bus inaugurés à Auxerre, la route du succès est encore longue… Les véhicules à hydrogène sont encore beaucoup trop chers et le nombre de bornes de recharge en France est inférieur à 40.
L’Agence internationale de l’énergie a relevé qu’en 2018, les ventes de voitures à hydrogène dans le monde avaient tout juste dépassé les 11000 exemplaires, essentiellement des achats opérés par des organisations gouvernementales. 80 % des véhicules vendus étaient des Toyota Mirai dont le prix avoisine 68000 euros.
Par comparaison, il s’est écoulé la même année 79 millions de voitures neuves dans le monde, dont 1,26 million de véhicules électriques.